J’ai lu Temple Grandin et The Autistic Brain dans le but de mieux comprendre ce qu’est l’autisme. Je recherchais alors des ouvrages qui ne soient surtout pas des ressources orientés développement personnel, qui présenteraient l’autisme comme étant un super pouvoir. Au contraire, je recherchais quelque chose de tout à fait pragmatique. La lecture de The Autistic Brain a largement participé à ma compréhension des troubles du spectre autistique. Pour toutes les personnes qui s’intéressent à ce sujet, quelle que soit la motivation, je conseille la lecture de ce livre pour une vision concrète et actualisée de ce qu’est l’autisme. Le livre m’a également informée sur ce que cela implique à la fois dans la vie quotidienne et l’évolution des prises en charge à travers les décennies.
Qui est Temple Grandin ?
Temple Grandin est née en 1947 à Boston. Elle fut diagnostiquée dans son enfance (2 ans) comme souffrante de “dommages cérébraux”. Elle n’a commencé à parler qu’à trois ans et demi. Son parcours présente de nombreux défis, qu’elle a surmonté de son enfance jusqu’à son doctorat.
Elle est reconnue comme la première personne autiste à partager son expérience de vie à travers des autobiographies marquantes : Ma vie d’autiste et Penser en images en 1995 respectivement publiées en 1986 et en 1995. Ses recherches sur le fonctionnement et la structure spécifique de son cerveau, axées sur la pensée visuelle, ont été publiées dans l’ouvrage Dans le cerveau des autistes ou (The Autistic Brain) en 2013. Ce dernier ouvrage commenté ici révèle des éléments très intéressants au sujet de l’autisme grâce à des techniques de scanographie avancées.
Temple Grandin est également une ingénieure de renom.
Le film « Temple Grandin » avec Claire Danes retrace son parcours de son enfance jusqu’à l’âge adulte.
- Ma vie d’autiste, 2001 en France (Amazon, Place des libraires)
- Penser en images, 1997 en France (Amazon, Place des libraires)
- Dans le cerveau des autistes, 2014 en France (Amazon, Place des libraires)
L’autisme et ce que l’on en a fait pendant les dernières décennies.
Je dispose de quelques clichés de mon cerveau, réalisés lorsqu’on recherchait des causes pathologiques pour des troubles de la sensibilité. Finalement nous n’avons pas trouvé spécifiquement de problème, outre le fait que j’ai une tendance à l’hyposensibilité pour l’appréciation de certaines doulours. Ou qu’à l’inverse, il m’arrive de subir de façon exagérée certaines choses. Imaginez que l’on vous touche et que cela provoque chez vous une sensation si forte que vous vous recroquevillez alors que vous constatez très bien qu’il ne se passe rien.
Je ne sais pas si le fait d’avoir des photos de mon cerveau sous plusieurs angles m’a permise de mieux apprécier la lecture de The Autistic Brain ou pas, mais ce fut un moment agréable et tout à fait pédagogique. Le livre est le fruit d’une collaboration entre Temple Grandin et Richard Panek, un journaliste habitué à l’exercice de la vulgarisation scientifique. Je dispose avec moi de trois pages complètes noircies de notes. Mais je vais essayer de vous transmettre quelques éléments qui ont changé ma perception de l’autisme.
Un fonctionnement différent du cerveau, pour un cerveau différent.
Temple Grandin nous narre qu’elle fut d’abord diagnostiquée d’un problème de développement lié à des dommages cérébraux. Avoir obtenu un tel diagnostic dans les années 50 fut sûrement à l’origine des capacités et des adaptations qu’elle a pu mettre en place au cours de son enfance, adolescence et pendant ses études. En effet, pris comme un trouble cérébral, l’autisme de Temple Grandin fut pris en charge par sa mère comme étant un état et non une maladie à guérir. Ainsi, Temple Grandin fut accompagnée pour vivre sa vie, ses rêves et ses ambitions. En retraçant une chronologie de la prise en charge des autistes, notamment aux États-Unis, l’ingénieure nous explique que la génération suivante a quant à elle malheureusement subi, certes une reconnaissance de l’autisme, mais aussi à une époque où les mythes comme la faute de la mère ou encore la nécessité d’enfermer et d’ostraciser les autistes étaient des conseils médicaux courants. C’était en effet l’âge d’or d’une psychanalyse qui jugeait que l’autisme avait pour cause un comportement de la mère inapproprié envers son enfant.
Autistic brains aren’t broken.
The Autistic Brain. Temple Grandin & Richard Panek
Même si l’on constate des troubles communs et des types de manifestations que nous pouvons considérer comme étant « classiques » pour des autistes, ou toutes les personnes dites neurodivergentes, chaque autiste est différent. C’est aussi simple à comprendre que le fait que chaque personne est différente et que les autistes ne font pas exception. Ainsi, parce que nous disposons tous de cerveaux faits différemment, les manifestations de l’autisme et de ses traits ne sont pas identiques d’une personne à l’autre. Ainsi je trouve cela effectivement plus fidèle à la réalité que de parler de trouble du spectre autistique (TSA). Si nous prenons pour exemple un trait fréquent qu’est l’hypersensibilité au bruit, nous pouvons dire que nous sommes absolument tous sensible au bruit. Absolument personne n’apprécie d’entendre des travaux toute la journée à l’étage du dessus. Pour une personne autiste dont la caractéristique serait l’hypersensibilité sonore, alors elle risque d’entendre les bruits de ces travaux de façon exagérée par rapport au reste de la population. Ainsi, les sons de la vie quotidienne sont plus pénibles, plus fatigants. Ils peuvent même entraîner des surcharges et un véritable épuisement au point de déclencher ce qu’on appelle : shutdown autistique, meltdown autistique ou burn out autistique. Attention, chacun de ces termes désigne quelque chose de subtilement différent. Ce ne sont pas des synonymes.
What if you’re receiving the same sensory information as everyone else, but your brain is interpretating it differently?
The Autistic Brain. Temple Grandin & Richard Panek
Les autistes et les autres
Pourquoi trouvons-nous les autistes bizarres ? Ne vous inquiétez pas, la plupart du temps, ce sont les autistes qui vous trouvent vraiment étranges.
En fait, c’est assez simple à comprendre. Il suffit de se dire que de grandir et de vivre avec un cerveau neurodivergent fait que l’on voit toute avec un filtre dont ne disposerait pas la majorité de la population. Saviez-vous qu’en France 8 % des hommes et 0,44 % des femmes ont été diagnostiqués comme étant daltoniens ? (source : snof.org)
Ainsi, il est à la fois difficile pour une personne non daltonienne de comprendre réellement ce que représente le fait de voir le monde ainsi, comme il est très complexe pour une personne daltonienne d’imaginer ce que pourrait être une couleur qu’il n’a jamais vue.
The problem isn’t which way you interpret the data. The problem is the data itself. […] A person who can’t imagine living in a world of sensory overload is very possibly going to underestimate the severity of someone else’s sensations and the impact on that person’s life […].
The Autistic Brain. Temple Grandin & Richard Panek
Voir la vie différemment crée évidemment des réponses différentes et une appréciation de la réalité qui ne peut être la même que celle de la plus grande partie des gens. Ce n’est pas un problème d’interprétation, de manque de volonté, ou de fainéantiste quelconque. Le monde est différent.
Hypersystémisation
Je sais d’expérience que j’ai une tendance à remarquer facilement des choses qui paraissent anodines pour d’autres. C’est sans doute ainsi que j’ai pu avoir des idées peut-être originale à ces moments, pour d’autres, ou bien que je suis capable de mener à bien quelques projets. Cela expliquerait aussi les sujets et activités que j’apprécie dans la vie ainsi que ma manière de les appréhender.
J’ai finalement eu l’occasion de mesurer cette tendance à la via un test de quotient de systémisation grâce à ce que l’on appelle la théorie empathisation-systématisation (ES), développée par Simon Baron-Cohen et ses collègues. En quelques mots, il s’agit d’une façon de fonctionner où on remarque facilement des schémas ce qui apporterait des capacités analytiques plus développées que pour la majorité des personnes. Cela est possible aussi grâce à une propension à classer les informations. Malheureusement il y a un revers de la médaille car les personnes, qui auraient un grand quotient de systémisation en comparaison avec la population générale, auraient des difficultés en ce qui concerne l’empathie. C’est-à-dire qu’il leur serait difficile de ressentir par empathie la souffrance d’une autre personne. Cela amène à des comportant que nous pouvons considéré comme étant inapproprié par absence de comportements réconfortants adéquats.
En savoir plus sur Temple Grandin.
Je vous propose de visionner cette vidéo de 3 minutes 10 par France Culture.
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Une autre ressource très utile : https://wrongplanet.net/