Tu en as peut-être entendu parler, mais la filmographie de François Truffaut (toute ?) est disponible sur Netflix. Or, j’aime bien rentabiliser l’abonnement Netflix, et il est vrai que j’aime assez en explorer les profondeurs. Ceci dit, Fahrenheit 451 était carrément mis en avant dans l’accueil de mon compte. Ayant lu il n’y a pas si longtemps le roman de Ray Bradburry, en tout cas assez récemment pour que je l’ai encore assez bien en tête, je me suis dit qu’il serait sympatoche de regarder ce film. Je ne l’avais jamais visionné, et cela m’a fait comprendre quelques petites choses.
J’ai lu le livre sans avoir vu le film, en fait, je vois grâce à mon historique de blog, que je l’ai lu en 2014. Je ne sais donc pas si je lis peu, ou si j’ai une mémoire étrange. Sûrement un peu des deux. Bref. Je disais quoi ? Ah oui. Donc. Quand j’ai lu le roman Fahrenheit 451, je m’en suis fait ma propre idée, et je ne comprenais pas toujours ce qu’en disaient les gens autour de moi. En voyant le film, j’ai bien compris pourquoi on parlait de Fahrenheit 451 sous l’angle des livres brûlés. Oui, c’est très important, mais ce n’était pas tant ce qui m’avait le plus marquée. Pour moi, bien plus que de brûler des ouvrages, il s’agissait aussi de créer aussi des mots et une autre version du monde. Avec du « novlangue », comme c’est écrit.
Edit du 12 mai : Soudain j’ai un doute, et je crois que je confonds avec 1984. C’est ridicule.
Mais peut-être que cela m’a un peu plus marquée en raison de mon attache au langage. C’est peut-être (sans doute) un peu embêtant pour les gens dont je suis proche parfois, et une des raisons pour lesquelles ma psy me trouve sûrement bavarde, mais je suis quelqu’un qui verbalise beaucoup, et qui pense beaucoup au sens des mots. Je sais que l’on n’a pas tous la même façon de verbaliser, ou le même besoin. Sans doute est-ce mon côté biculturelle (khmer + française), qui me poussa assez tôt à penser à ça. Bon ok, c’est aussi parce que je suis une intello à 2 francs qui pense beaucoup trop. Il a fallu que je m’adapte très tôt aux différentes visions que l’on peut avoir du monde, via le langage. Je me rappelle d’un épisode à l’école où j’ai été sanctionnée car je ne disais pas « s’il-te-plaît ». J’en ai en réalité compris le sens très tardivement, et je me suis rendue compte que c’était très occidental. Mon incompréhension a été résumée à une impolitesse, à une éducation manquée. Alors ce genre d’épisodes, me fait prendre du recul sur ce que l’on me dit aussi. Tout n’est pas rose ou gris (j’invente des expressions tavu), et les nuances dans le langage peuvent être aussi grandes que ce l’on devrait faire dans une carte de France à destination des daltoniens. D’ailleurs, c’est perturbant d’apprendre les couleurs d’une certaine façon, et de communiquer avec ses parents d’une autre, surtout quand en khmer on peut désigner par le même mot ce qui serait « jaune » ou « orange ».
Aucune idée de si c’est ce qui m’a fait beaucoup lire dans ma prime jeunesse (je suis toujours jeune, hein). Ou si c’est ce qui m’a poussée à vouloir manipuler des mots dans mon quotidien, et dans mon travail. Manipuler des mots, c’est concrètement le travail que je mène tous les jours. Parfois, je change de langage, par l’image, multicasquette, comme on dit. Couteau Suisse numérique (non, je déteste ce terme). Mais cela revient au même. Je prends mon stylo ou mon clavier, j’enfile une nouvelle tenue en fonction du dossier. Tantôt décontractée, tantôt corporate, tantôt sérieuse, tantôt rêveuse. Je me sens souvent comme une imposteur de l’écriture. Je le dis souvent, que je n’ai aucun style d’écriture. Mon travail, c’est d’identifier et de m’imprégner de l’identité d’un autre le temps d’un article, d’un dossier de 40 pages, ou d’une page de présentation d’offre commerciale. Ces derniers jours, cela m’a été vraiment très difficile d’écrire. Le moral, la forme physique, rien ne me mettait en disposition pour me déguiser derrière le clavier. Trop préoccupée à tenter de me retrouver moi-même, dans cette inertie, dans ce cerveau confiné, dans cette personnalité que je ne reconnais plus. Heureusement, tu es là, à me lire sur ce blog qui tient le coup depuis plus de 10 ans. Heureusement, ces derniers jours, j’ai réussi à lire à nouveau. D’autres personnes, qui ont leur propre voix, qui se sont essayés à leurS propres expérimentations de mots. Je ne suis pas eux, je n’ai pas leur technicité et j’ose à peine espérer atteindre leurs excellences. Mais s’il-te-plaît, continue, toi aussi, à écrire.
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