Sans la moindre idée de ce que pouvait bien être Shareyourmeal.net, j’admets que je voulais assister à cette conférence pour la simple raison qu’il y avait le mot “meal” dans le titre. On ne se refait pas, il faut bien que je sois fidèle à ma terrible réputation.
C’est donc avec talent que la conférence de Marieke Hart, fondatrice de Shareyourmeal.net, fut programmée juste après le déjeuner. Le principe de la plateforme est de pouvoir partager un repas que vous cuisiner avec votre voisin ou quelqu’un de passage. Le site permet quant à lui de créer le lien entre les personnes qui ont une place à leur table, et à ceux qui ont faim. Cela permet de ne plus avoir des montagnes de tupperwares avec des restes dans son réfrigérateur, de cuisiner et de partager un repas, et de rencontrer de nouvelles personnes !
Pour ma part, en tant que personne qui adore cuisiner, je trouve que c’est une assez bonne idée. Bien que j’aime cuisiner, j’ai du mal à le faire quotidiennement pour moi même et cela se termine régulièrement en un plat de pâtes au ketchup. Pourtant, si je ne suis pas seule, c’est un plaisir de préparer ou d’improviser quelque chose d’un peu plus élaboré.
Le propos de Marieke Hart insiste sur les bienfaits du partage. Elle le dit simplement : Sharing makes you happy !. Et il est vrai que cela est un véritable plaisir de partager un repas qu’on a préparé, comme c’est un plaisir de prêter un adaptateur secteur pour les prises UK à quelqu’un qui en a besoin pour pouvoir charger son ordinateur afin de poster ses articles. Prêter et emprunter, c’est une interaction tout à fait saine fondée sur le partage et l’entre-aide qui noue des relations. Par exemple, je ne prête pas ma gomme à quelqu’un que je n’aime pas, il y a quelque chose de très bisounours derrière la notion de prêt. Sauf chez les banques.
Le repas, source de partage, de plaisir et de découverte. E MEUR, Maëlenn, 2003. Thèse de doctorat.
Sur la notion du partage du repas, c’est une question qui a été traité bien des fois. Et les raisons pour lesquelles nous apprécions tant partager un repas relèvent du même plaisir qu’on a envoyer une photo de son assiette sur Instagram. C’est du partage, mais c’est aussi de l’invitation.
L’invitation à un repas est au centre des interactions sociales de notre culture. Nous invitons quelqu’un à partager un repas parce que nous l’apprécions, parce que nous l’aimons, parce que nous avons un intérêt professionnel à intéragir… Mais cela me rappelle aussi cette invitation que les bouddhistes (et notamment dans la culture khmer) font à leur ancêtres défunts lors des cérémonies religieuses. Nous préparons un repas copieux et nous invitons ceux que nous avons aimés par la prière à partager ces mets.
Et le partage du repas, n’est-ce pas le thème de cette histoire fondatrice de la culture occidentale ? Vous voyez de quoi je parle ? Pensez à la cène, ce moment où Jesus partage son dernier repas et qui est à l’origine de l’eucharistie.
Quelques références :
- LÉON-DUFOUR, Xavier. Le partage du pain eucharistique selon le Nouveau Testament. 1982.
- HERPIN, Nicolas. “Le repas comme institution: Compte rendu d’une enquête exploratoire”. Revue française de sociologie, 1988, p. 503-521.
- SCHMITT PANTEL, Pauline. La cité au banquet. Histoire des repas publics dans les cités grecques. École française de Rome, 1992.
- POULAIN, Jean-Pierre. Sociologie de l’alimentation. Puf, 2011.
- FLANDRIN, Jean Louis et COBBI, Jane. Tables d’hier, tables d’ailleurs: histoire et ethnologie du repas. Odile Jacob, 1999.
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