Maux de ventre à répétition, maux de tête pénibles, fatigue inexpliquée, perte de motivation, envie de rien, appétit chaotique… je pars consulter le médecin. Je le vois depuis un petit moment, il connaît ma situation familiale et professionnelle, il sait quel sport je pratique. Lorsque vient le moment du chèque et de la feuille de soin, il me tend cette dernière. Je lis alors “Burn-out” sur le motif de consultation. C’est un choc.
Je vous parle aujourd’hui de mon expérience du burn-out, longtemps après. Et après beaucoup d’introspection et de travail sur moi.
Moi, en burn-out ?
N’importe quoi ! Je veux bien être un peu fatiguée par mon boulot, avoir parfois envie de m’énerver ou bien être profondément triste, mais je ne me sens pas surmenée. Je ne finis pas à 23 h tous les soirs. OK il y a eu une période où je rentrais assez tard, mais c’était pour un projet en particulier et c’est passé.
Le médecin me prescrit quelques médicaments, du repos, et me donne des adresses de psychiatres à consulter.
Le surmenage comme symptôme compensatoire
Je ne suis pas spécialiste du burn-out et encore moins médecin. Chez moi, le surmenage s’est fait dans la vie quotidienne. Envie de tout faire, toujours plus, et toujours plus déçue par moi-même. J’avais une tendance à trouver le plat que j’ai cuisiné ignoble alors que tout le monde le trouve bon, car il ne répond pas à mes attentes.
Car la source du burn-out était là, ou plutôt celle du burn-in, la phase qui le précède. Quand on est en burn-out, c’est déjà presque trop tard, car c’est le moment où on explose et où on se rend malade. Pour rien certainement, car le boulot c’est juste le boulot. Cela concerne cependant au moins 35 heures de notre semaine, et en réalité 5 jours de notre semaine. C’est beaucoup.
Le décalage entre les attentes, les résultats, et la récompense
Je me demande parfois si la montée du terme burn-out n’est pas liée à l’ancrage du secteur tertiaire. Au final, vendre du service c’est vendre du temps. Je le vois d’autant plus maintenant alors que je vends à mes clients des journées de temps travaillé.
Imaginez-vous semer des graines de fleurs. Elles poussent doucement, et vous contrôlez soigneusement le taux d’humidité de votre terre pour savoir si vous devez arroser ou non et en quelle quantité. Vous allez même jusqu’à vous assurer que la plante dispose de tous les éléments nécessaires, composition du sol, exposition à la lumière… Votre plante est là et vos fleurs ont éclos. Vous êtes plutôt content du temps passé à vous occuper de ces fleurs. Elles vous ont demandé énormément d’attention et vous y avez mis la plus grande application possible. Pourtant, la personne pour laquelle vous avez réalisé ce travail va l’arracher et la donner à manger à son lapin alors que vous pensiez que c’était pour en faire un bouquet à exposer. Vous êtes remercié pour ces fleurs, simplement, à peine.
Voilà mon burn-out. Je pense pourtant qu’il y a des solutions pour éviter ce type de situation.
Prévenir le burn-out, c’est mieux définir son job ?
Plutôt que d’offrir des balles anti-stress ou des séances de fléchettes à ses employés, la prévention du burn-out doit peut-être se faire dans un cadrage mieux défini des missions. Je ne parle pas de l’idée de bien savoir ce qu’il faut faire. On sait à peu près tous ce qu’on doit faire pour obtenir un job bien fait.
Il s’agit plutôt de faire en sorte que les attentes sur la mission soient claires. Ne pas faire croire à quelqu’un que c’est la mission de sa vie, alors qu’il sera remercié avec un paquet de post-it d’une couleur différente de celle des autres. Il y a également une affaire de cohérence. Lorsqu’on pousse quelqu’un vers un travail ardu, alors la récompense doit être proportionnelle au travail fourni, pourvu que le boulot soit réussi c’est sûr. Justement, c’est quoi le boulot réussi ? Définir les critères de réussite, et leurs conséquences semble essentiel. Surtout quand on est dans un métier de service, il faut réussir à donner du sens à ce que l’on fait.
Je suis relativement en désaccord avec la considération du burn-out comme une affaire personnelle, où c’est la personne qui montre des failles, comme une voiture avec une erreur de conception. D’une part parce que lorsque burn-out survient, c’est le résultat d’un processus plus ou moins long. Cela vient sans doute de l’idée qu’est en burn-out le spécialiste, le perfectionniste et celui qui aime tout donner. Ce sont à mon avis tout simplement des personnes plus facilement exposées à la déception que peut apporter un décalage entre réalisations, attentes et résultats. D’autre part, dans un système hiérarchique où c’est quelqu’un d’autre qui note, et qui définit même le mérite de monter ou pas dans la société (par les augmentations, les promotions, la prise de responsabilité, etc.), alors l’accumulation de déceptions sur les attentes alors qu’on s’est beaucoup investi s’avère être une épreuve terrible.
Le risque est de considérer que tout cela est de sa propre faute. Lorsque cela peut juste s’agir d’un mode de fonctionnement de la structure dans laquelle on est (entreprise, école, association, qu’importe), on se sent alors responsable de l’absence de récompense proportionnelle à ses propres attentes. Cette récompense n’est pas nécessairement financière, il peut par exemple s’agir d’une plus grande considération de ses capacités ou l’acquisition de la confiance de sa hiérarchie. C’est là qu’intervient la courbe descendante. Phénomène curieux, plus on est déçu, plus on le devient facilement. L’engrenage est amorcé, le burn-out ne va pas tarder.
Se poser les vraies questions
On peut sortir du burn-out.
Cela passe bien entendu par un travail sur soi, de manière accompagnée ou non.
Cela passe aussi par le fait de se poser les bonnes questions. Pourquoi ai-je fait un burn-out, qu’attendais-je de ma hiérarchie et aussi qu’attendais-je de moi ? Est-ce que ce job est réellement fait pour moi ?
Quelles sont les choses qui m’apportent bonheur et épanouissement ? Est-ce que je peux trouver un compromis dans tout cela ?
Toutes ces questions permettent de trouver une solution. Elle peut être le fait qu’on n’est finalement pas du tout fait pour un job dans le secteur tertiaire et qu’on serait beaucoup plus heureux en étant fleuriste. Ou bien s’agit-il tout simplement de changer de secteur, ou de type de structure. Les solutions ne sont pas génériques, car là-dessus nous sommes tous différents.
En parler
Il arrive que lorsque quelqu’un frôle le burn-out, et qu’il est même en sérieux burn-in, l’entourage est déjà au courant avant lui. Si un doute plane, il vaut mieux en parler. On ne sait jamais.
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