Tout le monde connaît la dyslexie… mais la dyscalculie ? La quoi ? Hum… Si elle existe réellement et je peux en témoigner, puisque je suis moi-même dyscalculique. Ce n’est pas seulement “être nulle en maths”, c’est une réelle difficulté à manier les chiffres même pour les choses les plus simples. Et cela est tout aussi embêtant au quotidien…
C’est marrant tu n’arrives pas à faire une addition !
En fait non, ce n’est pas très marrant. Si on me donne une addition à faire cela passe par plusieurs étapes :
- vide intersidéral encéphalique, il ne se passe absolument rien dans ma tête,
- recherche de solution de contournement du problème,
- 10 minutes de réflexion,
- résultat de l’opération.
On parle d’un problème de “développement logico-mathématique”. Comme la dyslexie, il n’y a aucun rapport avec le quotient intellectuel de la personne, ou avec son origine sociale. Le seul problème est que je n’arrive pas à penser de manière numérique.
Tentons de décomposer ma pensée pour que vous compreniez
Par exemple : 723 + 142
euh…
En général si j’ai le temps, je pose l’addition comme on m’a appris à l’école primaire, puis je me servirai de mes doigts pour compter. Là on va faire comme si j’étais en situation de calcul mental. Dans ma tête ça fait :
Je sais que 3+2 ça fait 5, je me dis que si je fais 42+23 (dans ce sens c’est plus facile pour moi), alors cela me fera (40+20) + (3+2) donc ça fait 60+5….
Je mets le nombre 65 dans un coin de ma tête.
Bon la suite, je sais que 7+1 ça fait 8, parce que je sais quand même compter
jusqu’à 10. Donc euh…
700 + 100 = 800
et 800 + 65 = 865, donc 723 + 142 = 865.
Maintenant je vérifie sur une calculatrice (Google est mon ami).
VICTOIRE !!!
Et là, je suis super fière de moi, même si je l’ai fait en 10 minutes, parce qu’avant je n’y arrivais vraiment pas du tout.
Éclaircissons la situation
En fait, c’est tout simplement comme si mon cerveau était inapte à raisonner avec une valeur chiffrée. Je l’ai toujours su, j’ai toujours senti que j’avais une sorte de retard par rapport à mes camarades de classe. Mais étant donné que j’ai très vite développé des méthodes de contournement (comme ci-dessus), je m’en suis tout de même sortie jusqu’à la fin du collège.
C’est-à-dire jusqu’à ce qu’on ne me demande que du par coeur.
Je sais que 3+2 = 5, parce que je l’ai vu souvent, je sais que 7+3=10… Des petites choses comme ça. J’y pense réellement en me disant “qu’est-ce que je sais, qui pourrait m’aider”. Je peux additionner des petites unités, mais si ça excède plusieurs dizaines, je bloque.
Tout ce que je sais par coeur, je le sais et je m’en sers comme outil pour compenser mon incapacité total à raisonner par moi-même avec des chiffres et des nombres. Heureusement que j’apprenais mes leçons de maths ! Vous imaginez si en plus j’étais une cancre qui n’écoutait pas à l’école…
Et donc, comme je n’étais pas “nulle en maths”, on n’a jamais daigné m’envoyer chez un orthophoniste. Un jour je suis devenue nulle en maths, quand il a fallu raisonner par soi-même à partir de la Seconde. Et encore, ce n’est pas de la grande mathématique. Arrivée en Terminale, n’en pouvant plus, j’ai pris rendez-vous par moi-même chez un orthophoniste du coin.
Ce dernier me dit que si j’avais été prise en charge étant plus jeune, j’aurais eu une rééducation mais plus de problème maintenant.
Pas seulement une histoire de calcul mental
Cela pose un problème pour tout ce qui concerne les “estimations”. Par exemple je n’arrive pas à dire si le chat est à 1m de moi, ou à 30 cm de moi. Et je ne sais pas si j’ai parcouru 200m, ou 5 km. Bon je sais quand même faire la différence entre 2 km et 30 km, mes pieds et mon estimation du temps le ressent.
Mais je peux régulièrement : me tromper d’étage, me tromper de voiture pour prendre le tgv, me tromper d’horaire de train tout en étant réellement persuadé que c’est celui que j’ai imaginé, etc.
En conséquence : je me perds très souvent même dans des endroits que je connais, je pars avec énormément d’avance pour aller à un rdv parce que je ne sais pas si je vais mettre 10 minutes ou 1 heure, je me cogne partout, tout le temps, sans exception.
Bah oui, si je n’arrive pas à estimer la distance entre la poutre apparente de la chambre mansardée et ma tête… (expérience personnelle, qui fait mal). Pour preuve, j’ai quelques bleus.
Ne jetons pas la pierre
C’est plutôt méconnu, très difficilement détectacle.
Comment faire la différence entre un enfant qui n’a pas envie de faire son addition, celui qui a du mal à faire son addition, ou celui qui ne peut pas la faire.
La seule chose que je pourrais demander, c’est qu’on cesse de se moquer de moi lorsque je n’arrive pas à compter ma monnaie à la boulangerie, quand j’ai oublié combien j’ai payé le coiffeur, que je recompte des dizaines de fois combien de couverts je dois mettre à table.
Je ne suis pas totalement idiote. :)
Le plus embêtant dans tout ça, c’est qu’on peut m’arnaquer super facilement.
À lire à propos de la dyscalculie :
- http://www.ac-grenoble.fr/rep.fontaine/stage/dyscalculie.htm
- La dyscalculie, le sens perdu des nombres
- http://www.arte.tv/fr/hippocrate/Archives/Hippocrate/873836,CmC=873960.html
Et sinon, j’en parle là comme ça, mais en réalité j’ai mis beaucoup de temps à le comprendre vraiment.
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